Un clin d’œil du soleil et un appel pressant de la nature. Il n’en faut pas plus pour décider de partir. Effectuer une première marche, comme un voyage heureux.
S’en aller léger, loin des agitations fatigantes, des affairements, des tumultes bouillonnants. Juste retrouver le silence de la marche pour écouter mieux que jamais ce qui ne peut se traduire mais s’éprouve dans une grammaire réinventée.
Dissiper le faire pour s’aventurer dans le calme, loin des rues, des claquements de pas, des voix, des bruits multiples.
Marcher. Prendre de la hauteur et accueillir le silence comme un grand vent frais. S’engager dans la forêt où les bouquets d’arbres forment des murs mouvants.
Marcher sur les chemins tracés et s’en éloigner quelques fois. N’apercevoir que son ombre et ne répondre qu’au chant des oiseaux.
S’approprier ce monde encore en hibernation sous un soleil éclatant. Seul le léger crissement des pierres ou des branches mortes vient ponctuer le pas absorbé par sa méditation.
Avancer en se rassasiant de cette immobilité vibrante et en se gorgeant de la présence pleine des arbres sombres. Et on oublie les mots tant on reste à l’écoute de ce qui en nous résonne.
On n’est pas seul puisque entouré de tout ce qui vit : les arbres, les pierres, les fleurs. Et on converse en soi. Doucement. Puisque tout ce qu’on voit nous renvoie à nous- même.
Quelle joie immense vous prend alors, couvrant le craquement des branches et noyant la fatigue. On avance. Toujours plus loin.
Non pour fuir mais pour communier. Le cœur battant voir s’éveiller les sentiers désertés.
Avec lenteur, faire corps avec le temps. Ne rien brusquer. Se coller aux secondes qui s’égrènent en respirant profondément. On ne remplit rien. On se laisse remplir.
Le paysage est un paquet de saveurs, de couleurs, d’odeurs que mon corps infuse. Je me sens si bien au milieu du monde !
Annie Lautner ©
Illustration : Huile sur toile – Annie Lautner ©